Vente de médicaments à l’unité : éclairage
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29 octobre 2015Pour casser la logique inflationniste de la marge dégressive lissée (MDL) et continuer à faire baisser les prix des médicaments remboursés, le gouvernement modifie le mode de rémunération des pharmaciens en introduisant un honoraire de dispensation forfaitaire à la boite. De plus, la rétribution de leur rôle de conseil et de suivi auprès des patients devrait s’étendre à de nouvelles pathologies. Plébiscitée par les uns, décriée par d’autres, cette réforme amorce un changement profond du modèle économique des officines.
Depuis quelques années, au gré des lois successives de financement de la Sécurité Sociale, le gouvernement fait évoluer sensiblement le mode de rémunération des pharmaciens. Prime d’objectifs à la substitution de médicaments génériques, rémunération du rôle de conseil et du suivi du pharmacien pour les patients atteints de certaines affections longues durée… le modèle économique de l’officine évolue encore avec l’introduction de l’honoraire de dispensation. L’accord, signé fin mai 2014 après d’âpres négociations entre le gouvernement et des syndicats très divisés sur le sujet, prévoit de « déconnecter » la rémunération du pharmacien du prix du médicament. En clair, la rétribution du pharmacien s’effectuera désormais via un prix forfaitaire à la boite sans plus tenir compte du prix des médicaments remboursés. L’accord prévoit 80 centimes d’euros d’honoraire de dispensation par boite en 2015, forfait qui passera à un euro en 2016. Ce système va augmenter les sommes perçues par les pharmaciens sur les médicaments les moins chers et les baisser sur les plus chers. Et favoriser les officines qui délivrent beaucoup des uns et moins des autres…
Rémunérer les missions de santé publique
Or, vendre une boite de paracétamol nécessite bien moins de conseil, d’accompagnement et de suivi, que la délivrance d’un traitement contre le cancer par exemple. Pour « compenser » ce manque à gagner, le gouvernement prévoit aussi d’élargir les rémunérations forfaitaires déjà octroyées pour les missions de santé publique auprès des patients atteints d’affection longue durée. C’est aujourd’hui le cas pour les Anti Vitamine K (anticoagulant) et les Broncho-Pneumopathie Chronique Obstructive (BPCO). Ainsi, les pharmaciens perçoivent des honoraires de 40 euros annuels par patients atteints de ces affections. « Ce système va enfin mettre le pharmacien au cœur du système de santé publique, se réjouit un professionnel du secteur. Le pharmacien n’est pas un vendeur de boites de médicaments ! Il explique, il conseil, il délivre… Ce doit être considéré comme un acte médical à part entière et rémunéré en tant que tel ! ».
Un modèle économique bouleversé
Cette réforme va profondément bouleverser le modèle économique des officines. Dans son étude annuelle sur la situation économique des pharmacies, le cabinet KPMG annonçait en mars dernier et pour la première fois que le chiffre d’affaires des officines de son panel baissait de 1,3% en moyenne. Pour les experts du cabinet, « le nouveau modèle ne permet plus de mesurer la performance économique d’une officine par son seul chiffre d’affaire. La répartition de l’activité par type de produits, le taux de substitution, les produits chers sont autant de facteurs qui influent sur le CA mais encore plus sur la marge. »
CA en baisse mais marge en hausse… pour l’instant
Pour KMPG, ce phénomène va encore s’accentuer avec l’entrée en vigueur des honoraires de dispensation. « Ce changement s’exprime dans une baisse du CA qui s’accompagne d’une augmentation du taux de marge et de la marge en valeur absolue. Il serait d’ailleurs plus approprié de parler de « rémunération officinale » que de marge car dans notre étude nous incluons dans la marge toutes les composantes de la rémunération : marge, remises arrières, rémunération à la performances ou ristournes coopératives. » Et déjà en mars, cette rémunération officinale moyenne augmentait de 2,8% (13 600 euros en valeur). « Voilà de quoi redonner quelques couleurs aux résultats des officines, concluait l’étude. KMPG reconnaissait toutefois que les nouveaux changements annoncés dans le modèle de rémunération (pour 2015 et 2016) allaient rendre la lecture des chiffres plus incertaine que jamais.