L’agencement : « mal nécessaire » ou levier de performance ?
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7 avril 2014L’automatisation dans les officines est séduisante : des solutions qui reposent sur des technologies toujours plus innovantes, et qui promettent gain de place, de temps, optimisation du stock et de la masse salariale. Et ce, sans vraiment plus tenir compte d’un seuil de chiffre d’affaires, tant les offres des fabricants sont modulables et les prix attractifs en entrée de gamme. Pour autant, l’automatisation est-elle la panacée ? Il est évident que chaque problématique est unique et dépend du profil de l’officine et de son environnement, concurrentiel notamment. Qu’en pensent les pharmaciens qui ont l’expérience de l’installation d’un robot dans leur officine ? Nous le leur avons demandé !
Un pharmacien ayant installé un robot dans sa précédente officine…
Il y a trois ans, vous avez décidé d’installer un robot dans votre officine : quelle était votre problématique ?
Mr. G : elle était double : tout d’abord, nous avions des contraintes d’espace dans l’officine. Les génériques ont entraîné une multiplication des références et nous manquions d’espace de stockage. Il fallait emprunter un escalier étroit pour se rendre dans la réserve à l’étage, ce qui n’était vraiment pas pratique. En outre, à ce moment-là, nous faisions face à une montée en charge de l’activité et il fallait faire un choix.
Lequel ?
Mr. G : celui d’embaucher un mi-temps supplémentaire ou d’optimiser la gestion de notre stock. L’officine comptait déjà un adjoint et trois préparateurs. Avec 220 passages par jour et une grande amplitude horaire d’ouverture, elle réalisait 1,7 million d’euros de chiffre d’affaires. Le manque d’espace a motivé notre décision d’opter pour une solution totalement automatisée de gestion du stock.
Pourquoi un robot plutôt qu’un automate ?
Mr. G : parce que le robot travaille vraiment tout seul, contrairement à l’automate qui nécessite une assistance humaine et qui, de ce fait, entraîne une surcharge de travail ! L’automate, c’est une sorte d’étagère inclinée avec un injecteur qui pousse les produits. Mais il faut remplir toutes les colonnes de l’automate à la main, ce qui aurait impliqué de détacher un mi-temps. Nous avons donc décidé d’investir dans un robot ARX. Il est doté d’un logiciel intelligent qui connaît toutes les caractéristiques des étagères et d’un chargeur automatique, donc il gère tout seul ses espaces de stockage ! En cas de panne, on dispose d’une console qui explique où sont rangées les boîtes que l’on peut alors délivrer manuellement.
Dans la pratique, comment ce robot vous a-t-il permis d’optimiser la gestion de votre stock ?
Mr.G : concrètement, c’est le robot lui-même qui devient le stock et il a une capacité de 12.000 boîtes ! Dans un espace très réduit, on a donc optimisé au maximum notre capacité de stockage, le robot faisant seulement 2,2 mètres de hauteur, 1,80 mètre de large et 5 mètres de long. Il traite aussi bien les boîtes que les sachets, les sirops, etc. Il gère environ 90% du stock de produits à TVA de 2,10%.
Quel investissement représente l’installation d’un robot et quel retour en attendre ?
Mr. G : les avantages sont de plusieurs ordres. Pour la clientèle de l’officine, tout d’abord, le bénéfice est immédiatement perceptible : déchargé de la gestion manuelle des produits, le pharmacien gagne en effet un temps précieux au comptoir, ce qui le rend plus disponible pour écouter et conseiller les patients. Ce gain de temps très important a naturellement profité à l’ensemble de l’équipe : grâce à son logiciel interne, le robot reconnaît chaque code barre et il range lui-même les commandes ! Ce logiciel lui permet de gérer aussi les dates de péremption et de réaliser un inventaire quotidien. En terme de coût, ce robot a représenté un investissement de 120.000 euros, avec un crédit bail de 6 ans. En fait, selon les modèles, un robot coûte entre 1200 et 2000 euros par mois. Le robot nous a donc permis de ne pas embaucher de mi-temps supplémentaire et d’économiser de 3000 à 5000 euros par an sur l’inventaire et les périmés.
Cet outil nécessite une maintenance qui a également un coût ?
Mr. G : en effet, il faut être vigilant car si la maintenance est gratuite les deux premières années, son coût est élevé après la garantie, entre 400 à 700 euros par mois, car il y a des mises à jour logicielles. Attention également au changement de titulaire : les fabricants en profitent souvent pour augmenter le coût négocié de la maintenance, parfois même de 25 à 50% !
En terme de travaux d’aménagement ou d’encombrement dans l’officine, un robot peut-il entrer, selon votre expérience, dans toutes les officines ?
Mr. G : un robot est en fait entièrement modulable en hauteur et en profondeur, donc c’est à mon avis adaptable à tous types de surfaces d’officines. Pour ce qui est de l’aménagement, il faut compter une semaine de montage et une semaine pour les réglages et paramétrages.
Autre point de vue d’un associé dans une officine…
Vous avez l’expérience de l’installation d’un robot dans une officine, quelle est selon vous la meilleure des raisons de faire ce choix ?
Mr. D : la première des motivations est le manque de place dans l’officine. Le plus souvent, c’est cette problématique qui amène le pharmacien à s’intéresser au robot, lequel présente en effet l’avantage d’occuper un minimum de mètres carrés au sol pour ranger le maximum de boîtes. Mais, selon moi, si l’on dispose de davantage d’espace et que l’on achète un robot, on a intérêt à travailler dans une grosse officine !
Que voulez-vous dire ?
Mr D : le robot reste un produit très cher, puisqu’il faut envisager un investissement d’au moins 100.000 euros. Je me pose la question de la rentabilité d’un tel investissement pour une officine qui réalise environ 1 million d’euros de chiffre d’affaires et qui va amortir le robot sur 10 ans ! Ca me semble plus rentable pour une grosse officine qui a beaucoup de passage et réalise un chiffre d’affaires au-dessus de 2 à 2,5 millions. Même si, pour cette taille d’officine, un robot qui fait tout coûtera plutôt de 120.000 à 140.000 euros.
Cet investissement n’est-il pas à mettre en regard de l’économie potentielle d’un poste ?
Mr D : selon moi, l’économie de main d’œuvre est très théorique. Certes, l’acquisition d’un robot libère le temps de la personne chargée de ranger les boîtes. Mais si l’on observe bien ce qui se passe sur le terrain, il est évident que la personne qui range les médicaments ne fait pas que cela dans l’officine ! Et puis quand on achète un robot, il faut bien néanmoins continuer à réceptionner les colis, à ranger à la main ce qui relève du libre-service, ce qui est mis en avant, etc.
Mais le robot représente bel et bien un gain de temps ?
Mr D : effectivement, ce qui est bien avec le robot, c’est que la personne qui est au comptoir n’a plus besoin de quitter le client pour aller chercher les boîtes derrière, puisque ce sont les boîtes qui viennent à elle. C’est autant de temps supplémentaire passé à interroger le patient, à discuter avec lui de sa pathologie, à lui fournir du conseil.
Que diriez-vous aux pharmaciens qui s’interrogent sur l’opportunité et la pertinence de l’achat du robot, notamment en cette période difficile ?
Mr D : je le répète, le gros problème du robot c’est l’amortissement de l’investissement. Les prix des robots n’ont pas du tout baissé en 10 ans. En même temps, leur technologie a progressé, c’est vrai, mais ils restent trop chers. Je dirais que si l’on est un peu juste en termes de chiffre d’affaires et de rentabilité de l’officine, le robot ne règlera pas le problème. Mais si l’on traverse un problème économique et que l’on s’interroge sur la suppression d’un poste dans l’officine, le robot peut alors pallier en partie la perte de main d’œuvre. Mais le problème économique demeurera…